mardi 13 mai 2008

Un peu plus tard.

Café, thé, paroles alternatives et soudain

je me souviens d'une quête
passionnante

celle d'identifier comment aujourd'hui
chaque histoire se lit en plusieurs versions
et cohabite avec les possibles

arborescence
équivalence des choix
réversibilité
impossibilité de la disparition
recyclage des fantasmes
perméabilité concret/immatériel

il s'en faut toujours d'un cheveu

d'ailleurs c'est pour ça que je suis perplexe
puisque le refus que tu m'opposes je peux le balayer
j'ai déjà fait ça et je saurai comment m'y prendre
et je ne sais pas pourtant si je ne vais pas laisser courir
ou renoncer

peut-être pourtant
existe-t-il encore une autre voie

peut-être est-ce la recherche de cette autre voie-là qui va me redonner du cœur à l'ouvrage
pour vivre : trouver quelque chose à créer
qui soit de la vie même

évidemment
j'aspire à faire des enfants avec l'homme que j'aime
et pour ça je suis prête à inventer une vie pas tracée d'avance

mais là, que faire d'autre
il faut bien se proposer de nouvelles perspectives
intimement je sais qu'il y a une voie pour lui et moi
escarpée sur un flanc de montagne
il me lâche
je peux persévérer

je peux aussi quitter ce sentier périlleux avec amertume
redescendre
pour remonter par une autre pente
où on se rencontrera peut-être
mais plus sûrement on s'y refusera
il sera trop tard

on sera loin

d'où mon amertume à renoncer à la parfaite aventure à vivre aujourd'hui
aujourd'hui mon amour

parce que tu éprouves
une insurmontable difficulté

je pourrais te dire : allez ! courage ! on y va !
mais je suis fondamentalement en jeu aussi
tu me lâches je risque de tomber
la priorité c'est de se rétablir
et peut-être même de te laisser vivre ton truc

- en même temps, je te laisse absolument le vivre, tu passes ton temps à le vivre, on se voit si peu, et je ne te réclame rien d'autre que le peu de temps que tu m'accordes, je te réclame un minimum que tu ne peux même pas (même plus) m'accorder, parce que tu as juste juste peur de t'enfermer, et je ne te demanderais rien que tu serais quand même accablé par le sentiment d'aliénation -

tu sais quoi : tu me retires quelque chose qui n'existe de toute façon pas
tu retires une illusion
un espoir
que je croyais fondé

que je crois toujours fondé

mais je souhaiterais voir notre connivence réelle et sincère et profonde
débarrassée des entraves maladives

je n'arrive jamais à croire que c'est trop tard
c'est trop tard quand on est mort

donc : juste je ne sais pas à quel moment ma vie doit se jouer sur un autre mode
je renouvelle les mêmes démarches et je prends les mêmes claques
disque rayé ou initiation inévitable...

c'est ce que je ne sais pas
dans cette société normative
où l'idéal ce n'est pas ça
et où pourtant tous les codes sont brouillés et où tout est tout le temps à écrire

restent : sentir ce qui est juste
éviter de s'imposer la contradiction à soi-même
s'épargner des années et des années encore de galère

à vouloir foncer dans le gouffre de cet amour-là
qui n'aura peut-être représenté qu'un ticket pour rentrer

et où, une fois de plus, j'aurai révélé à un homme ses propres chemins vers l'accomplissement
et où, une fois de plus, je n'y participerai pas

ingratitude fondamentale
comme s'il n'y avait nulle responsabilité à me quitter

j'aimerais qu'il assume le fait de s'être engagé auprès de moi
(ah... comme c'est étonnant)
j'aimerais qu'il assume que c'est son choix
et que non, je ne serai pas mieux sans lui.
puisque je l'ai choisi et que je pars encore une fois pour lui

mais c'est bien de croire ça qui l'anéantit
et je ne peux pas mentir

et est-ce que je veux d'un type qui se dérobe
en plus

tu m'as dit que tu étais du genre à tout essayer pour que ça marche
et j'ai eu le tort de te croire

oui je pourrais être très en colère
si je ne comprenais pas ce qui se trame malgré toi
si je ne devinais pas quelle culpabilité te pèse déjà à cette heure-ci
et que tu fuis cahin caha dans une activité frénétique

presque : je comprends trop
je ne sais toujours pas si j'accepte

moi, vous savez, je suis trop con, je suis prête à tout accepter
parce que je sais que je tiens fondamentalement le coup
puisque j'ai réussi à échapper aux entraves familiales
puisque ma survie affective s'affirme dans les moments extrêmes
et que le reste fonce comme sur des roulettes

et parce que je l'aime
parce que je l'aime et que l'amour justifie tout
dévouement, courage, résistance à l'orage
espoir renouvelé

j'ai tenu presque six ans comme ça
jamais découragée

la dernière fois j'ai contourné le problème en laissant passer du temps
en deux mois je suis tombée amoureuse d'un autre
follement
j'ai complètement relégué mes intentions de sauvetage du couple aux calendes grecques
dans l'intention espoir illusion
de conquérir le cœur lointain
dont j'étais l'amante provisoire
et qui attend un enfant à présent
(intensité cruciale des moments d'avant l'engagement)
(ingratitude fondamentale)
(courir après les coups de vent)
(Sisyphe)

ensuite, fantasmes, amant, détachement
puis
ce musicien
coup d'éclat
j'ai dit : oui

il abandonne la partie
si je renonce à nous j'en ai pour un temps fou
et ça n'ira peut-être pas mieux après
puisque c'est toujours la même histoire à travers des rencontres différentes

alors que faire
si je vais au charbon
je reconquiers un homme qui chroniquement m'en fera baver
or suis-je là pour jouer les services d'aide aux blessés du cœur

pourtant serait-il complètement absurde de croire qu'il peut m'aimer sereinement
comme il l'a montré en période de confiance

n'est-ce pas le reflet d'un coup dans la confiance
du genre dont on se relève

dois-je laisser tout ça se jouer sans moi
jusqu'à ce qu'il soit en mesure (peut-être) d'assumer et de revenir vers moi
ou : vers une autre

puisqu'il sera trop tard
et qu'il n'oserait pas
pensant qu'il s'est grillé

oui mais
si c'est l'épreuve de l'amour
ma chère
justement
voyons s'il est en mesure
de revenir sur ses pas
alors : ce serait toujours le même schéma con
justement parce que moi-même je paraîtrais moins dangereuse en tant qu'inaccessible

dans tous les cas une patte d'oie entre impasse et sentier escarpé

tu parles d'une aventure

alors, tu vas mieux ?
t'es soulagé ?
ça marche, ton antidote au dilemme, trancher le nœud gordien... ?
foutre en l'air l'amour et les projets ?
couper court au mûrissement des fruits de notre rencontre ?
mettre fin à l'exploration des corps qui nous épanouissait sans aucune ombre au tableau ?

je te le souhaite.
mais je n'y crois absolument pas.
Je suis offusquée que toi, la personne la moins lucide en ce moment sur le sujet, tu puisses décider de mettre fin à quelque chose qui nous concerne tous les deux et qui, à quasiment tous les égards, s'avère prometteur.

Je dénie tout bon sens
à l'idée qu'on n'arrivera pas à trouver notre compte dans une histoire sous prétexte de nos personnalités, de nos attentes et de notre emploi du temps.
Je déteste cette pusillanimité à laquelle tu ne m'avais pas habituée.

Or, exactement dans le même mouvement
je sais
que toutes ces fausses raisons
creusent précisément au même moment
le gouffre des fragiles équilibres
où s'anéantit l'état de grâce

mais
mais

je n'arrive jamais à croire que c'est trop tard
c'est trop tard quand on est mort

Aucun commentaire: