jeudi 24 avril 2008

De nouveau à I. et c'est bien. Accueil riant une nuit de vent sur la terrasse, bière et clopes et papotages. Un tour sur l'île où les filles concluent une location pour l'année, chambres spartiates, jardin en friche et la mer en bas de la côte.

Dans le crépuscule, avec le vin frais sur les grillades et I. clignotante au loin, on a tiré le Fal dans les tasses sillonnées de marc. La patronne, blonde hâlée libérée, s'éclipse respectueuse dans un rire. On s'accorde la superstition comme une gourmandise par ici, c'est bon, ça fourmille d'espoirs parce qu'un avenir existe, lisible dans tous les sens : les coins des rues, les regards, le temps te disent quelque chose de toi, alors tu es au monde.

Et justement : la nuit de mon arrivée il y avait une grande fille brune, que j'ai confondue brièvement avec une autre, mais en fait elle je ne l'avais jamais vue avant.
C'est elle.
La nouvelle de mon ancien.
Elle y va demain.
Elle sait peut-être qui je suis, imperceptibles signes. Ses doigts sitôt retirés qu'effleurés sur le verre d'eau que je lui ai servi à midi dans la grande cantoche où je retrouve l'ancienne équipe qu'elle a rejointe cette année.
Elle y va demain, le voir, la première depuis moi avec lui sur la côte de granite, et le poisson dans la maison familiale.
Je n'ai rien dit.
Ca travaille à l'intérieur, et c'est encore une étape que m'a réservée l'inépuisable I. dans mon histoire avec elle, et dans mon histoire avec celui qui m'a accompagnée ici, il y a des années de cela, et qui est resté. Sauf en ce moment où, visa suspendu, il attend en France l'heure du retour.
Elle y va demain, elle laissera sa fille aux mains du père.

Parcours intimes étonnants, éloquents, où l'une se retrouve avec le musicien que l'autre aurait voulu être, et lui avec la femme accomplie que représente une maman à mes yeux. Symbolique, tout ça, et fugace peut-être.

Remous des profondeurs, et moi où j'en suis, avec l'homme que j'aime indécis.
Avant le peut-être grand pas vers cet espace à nous deux près de la mer où un coup de vent nous a portés il y a quelques jours, et qu'on a fuie sous des trombes d'eau, tempête exaltée à travers la route devenue opaque, où le dialogue sensuel tourne à la sauvagerie de la caresse à 100 à l'heure, ses doigts inspirés insinués, engouffrés sans regard dans le nid goulu que je leur offre, épuisement consumé dans le bain hospitalier du retour, trombes d'eau, le lendemain il part à 5h30 sur la gorgée le baiser du café
et après
c'est mon tour
je ne lui laisse que le carnet sur l'oreiller avec quelques mots pressés et énigmatiques
ça parle d'eaux troubles où se jeter

Il n'y a pas trop de visibilité

Heureusement

C'est ici que tout commence
m'a-t-il dit
- un écho qui s'ignore -
le temps d'un premier (premier?) breuvage au vieux port...

4 commentaires:

Anonyme a dit…

"l'homme que j'aime indécis"
c'est beau comme une photo de plossu...
(la même syntaxe)

Anonyme a dit…

mais tout ce texte, sa syntaxe, ses images...
décidément... les mots d'I...

Anonyme a dit…

en fait, c'est idiot, il y a aucune syntaxe dans les photos de plossu...
mais je t'ai volé cette indécision...
bises

derobee a dit…

Je ne connaissais pas Plossu : merci pour la découverte - et du coup, c'est clair, la syntaxe de l'indécision, des images volées du train, tout l'espace des possibles suspendus...
L'homme que j'aime indécis, je m'aperçois que, lapsus, je l'aime peut-être précisément parce qu'il ne sait pas, alors même que je prétends l'inverse...
Et la vie sur le fil.